Les Trois Continents : On lâche les fauves ! Le départ et la première étape
Dimanche 1er Juillet. On s’active aux derniers préparatifs sur le ponton de la Mairie. Familles et amis ont rejoint les coureurs et chacun se livre avec plaisir au jeu des dernières photos, des derniers films. Demain, nous serons seuls sur nos bateaux et tous ces visages auront disparu. Disparus aussi, la frénésie des derniers jours, le stress du détail négligé.
Au bout du ponton, Jean- Marie Vidal orchestre le départ et largue une à une les amarres des concurrents.
Nous sommes en retard et nous avons du mal à hisser la grand-voile qui se déralingue au fur et à mesure que l’on échine sur la drisse. Conseil de Jean-Marie : " il faudra changer ça pour tes navigations en solitaire ! ". Je sais ! Lors de la Mini Solo, j’avais mis de longues minutes à renvoyer mon second ris après une remontée difficile vers Gruissan, au près dans 40 nœuds de vent.
Le vent monte dans la rade de Marseille et nous prenons le départ au près sous GV un ris. Thomas est à la barre tandis que je joue de la quille pendulaire et du matossage. Je me jette enfin dans les filières, à la manière Melges 24. Notre départ est bon et nous sommes premiers. Sous notre vent, Tatami tient bon, sous GV haute et solent ! L’effronté ! Metalco glisse sous le vent en compagnie de Nicolas Charmet. Ils disparaissent petit à petit dans le brouillard de ce premier dimanche de Juillet.
La traversée est sans histoire jusqu’au sud de la Sardaigne. Le bateau avance vite, facilement et nous taquinons régulièrement les 10 nœuds. Thomas et moi alternons nos quarts toutes les deux heures et nous avons alors le plaisir de nous allonger sur un matelas sec, pas encore poisseux, et de rêver en dormant. C’est presque trop facile ! Pas d’angoisse d’un mistral qui se lève, pas de nuit dans la pétole à enchaîner les changements de voile, pas de murs d’eau s’écrasant sur le pont et pas non plus de petites lueurs persistante derrière nous. Chaque vacation radio nous confirme notre seconde place. Nous sommes tout de même impatients de compter les points au passage de la porte de Carlo Forte. Et… où est Metalco ?
La course au large est une discipline amusante. Au début de l’étape, on distribue les cartes et chacun annonce sa couleur. Ensuite, on joue, on déploie l’option pendant de longues et de longues heures sans savoir quels sont les atouts des autres joueurs. On imagine maints et maints scénarios. Deux fois par jour, le maître du jeu révèle la position des concurrents (sauf s’ils sont trop loin ou si la VHF ne marche pas) et cela donne lieu à de nouveaux scénarios. A la fin du jeu, à l’arrivée ou au passage d’une porte, on compte les points et l’on a parfois des surprises.
A Carlo Forte, nous eûmes lieu de nous réjouir et de nous attrister… Excentric, le bateau pointeur nous confirma notre seconde place. C’est bien ! Mais, lorsque je demandai à quelle heure était passé Metalco, Rémy eut une sorte de gêne, comme une hésitation…. " Metalco est passé ce matin, à 10h30 ". Il était 20h. Sur 300 milles, Matthieu et Laurent avaient réussi à nous prendre 9 h 30. Ce n’est plus une avance, c’est une humiliation !